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Cogitations et actions
Chronique 138
09-12-2021

 

Idées cadeaux de Noël, suite

En 2022, tous des passagers clandestins !

 

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J'ai déjà chroniqué des ouvrages des éditions Le passager clandestin et je ne manquerai pas de le refaire car j'apprécie beaucoup le travail de fond qu'elles réalisent depuis aussi longtemps que LocoBio (2007). Je pense en particulier aux collections « Boomerang », « Précurseur.ses de la décroissance » ou «Transparents » qui ont pour objet de faire connaître d'anciens écrits écologistes et plus généralement (et légitimement) contestataires. Comme on s'accorde aujourd'hui à le penser et à le réaliser pour le féminisme, il est en effet très important de montrer que des pensées autres, critiques à propos, existent de longue date. Rétablir de la continuité, se réapproprier notre mémoire sont la clef pour agir et c'est aussi ce que vous pourrez faire grâce à une autre collection, la bien nommée « Désobéir », qui propose des guides dans la lignée de la désobéissance civile. Une des originalités de ces éditeurs est aussi de s'être lancés assez tôt dans la fiction, en l'occurrence dans la publication d'anciennes nouvelles de science-fiction et d'anticipation, ce qui permet de s'aérer un peu la tête par rapport à la lecture plus austère (mais nécessaire) d'essais et de mesurer combien, souvent, ils avaient vu juste. Une collection d'essais, tiens justement, colle au plus près et au mieux de l'actualité, offrant ainsi une aide utile pour comprendre ce qui se passe car, il faut bien l'avouer, on sent bien qu'il se passe des choses mais ce n'est pas toujours très clair. Alors agir dans ces conditions...

C'est précisément ce que permet L'an vert. 52 semaines pour sauver la planète, un livre comme un petit cahier d'écolier sympathique avec sa couverture en simili papier kraft et ses dessins d'un humour salvateur réalisés par Red. Pour la somme assez imbattable de 7 euros, vous voici dotés d'un vrai bréviaire de combat pour bien attaquer l'année. Car autant dire qu'il ne va pas s'agir de mollir. Pour une fois, ce n'est pas moi qui le dis mais un collègue délégué général, co-auteur du livre, celui d'Agir pour l'environnement. Dans un édito percutant qui vous réveillera si pas déjà fait, qui vous accompagnera toute l'année et peut à l'occasion vous servir d'argumentaire pour qui vous voudriez convertir à la cause de la Transition, Stéphen Kerckhove annonce clairement la couleur : et de une le changement est impératif, et de deux sinon nous entrons « dans le temps de l'irréversible », et de trois la seule question qui se pose est de savoir si on veut choisir ou subir et de quatre bien sûr que non on va pas baisser les bras et même qu'on va retrousser nos manches. Boum ! On dirait moi trop souvent parfois et j'avoue que se prendre direct ça dans la tête, en plus si c'est en cadeau à Noël, je préfère faire ma petite peste (enfin continuer) et l'offrir, moi, à quelqu'un d'autre :). D'autant plus que les choses sont bien carrées et je ne peux qu'y souscrire. Je cite car, comme on dit dans le Sud, il n'envoie pas dire les choses : « En vivant la transition comme une émancipation à l'égard du système productiviste, nous pourrons enfin nous libérer des oripeaux d'un matérialisme asphyxiant. (…). Ce n'est pas parce que l'erreur est humaine que l'humain doit être une erreur planétaire. Abordons les crises écologiques et sanitaires comme des opportunités de retrouver enfin le chemin du progrès humain, les voies d'un futur désirable et d'une vie vivante ». Et pan !


Et pan et c'est parti pour 52 semaines de passages à l'action qui peuvent au départ donner le vertige car le sommaire n'est rempli que de « J'arrête de », « J'arrête de »... soutenir l'agriculture industrielle, prendre l'avion, etc... La liste est forcément longue et moi je me mets direct en mode plutôt : alors qu'est-ce que je commence ? D'abord, et c'est un des mérites de ce petit ouvrage, je commence à utiliser mon cerveau parce qu'il n'y a pas que les objets connectés autour de moi qui en ont un (et encore, faut de l'énergie et jusqu'à nouvel ordre JE suis plus complexe, non mais dit!;). Autre réappropriation, au passage, mignonne, de taille, histoire de, un peu no comment mais quand même, quand même parce tant qu'à avoir (encore) un cerveau, autant qu'il serve à se poser des questions. Et ce livre est autant, peut-être plus (une de ses limites, lui qui prône le retour de la limite?;)) un manuel d'action qu'une ouverture, une invitation à la réflexion, à cesser d'être sur des rails. Un exemple ? Tout simplement la semaine 26 « J'arrête de croire que les petits gestes peuvent tout changer » qui pourrait décourager et tout simplement conduire à s'interroger sur, alors, mais pourquoi ce livre, alors que c'est un effort sain de relativisation de notre petite part. J'entends par là ce que chacun peut faire individuellement dans sa vie quotidienne, genre réaliser le tri sélectif, ne pas acheter d'emballages en plastique, etc... Car comme le dit bien S.Kerckhove, « (…) les petits gestes sont les enfants illégitimes de l'individualisme triomphant. Or, pour gagner la guerre climatique, des changements structurels et collectifs seront nécessaires, passant par des réglementations contraignantes et une fiscalité adaptée. A défaut, une petite minorité exemplaire (ou tentant de l'être) s'épuisera sous le regard mi-amusé, mi-agacé de consommateur.ices impénitents ». Je vous le dis, ça rigole pas (enfin si, les illustrations sont aussi mignonnes que plaisantes et pertinentes) et tout est un peu comme ça, à rappeler sans cesse la nécessité d'une véritable mobilisation générale tout en faisant chaque jour un peu à sa propre échelle. Exemples ? En utilisant les outils déjà existants comme une petite lettre au préfet pour lui demander que votre terrain ne fasse pas partie d'un territoire de chasse et que le périmètre réglementaire autour des habitations soit bien respecté (petit rappel utile car les chasseurs ont le vent en poupe sous l'actuelle présidence de notre chère et défigurée République, à s'en demander la raison). Il y a aussi bien choisir sa banque en conscience (et si, et si, allier banque et conscience...:)), et la semaine 35 vous donnera des pistes concrètes pour savoir qui se vautre dans le financement d'énergies aujourd'hui inadaptées et qui essaie au contraire de faire autrement. Mention spéciale au streaming car le livre souligne à juste titre l'addiction massive au numérique et, là encore, des pistes concrètes sont données pour alléger l'impact écologique lié aux vidéos en ligne. Un peu plus hardcore mais reste à savoir si on ne va pas en arriver là et s'il ne faudrait pas hâter le pas, la proposition en semaine 24 de verser des aides spécifiquement à celles et ceux qui optent pour des couches lavables. A quand du courage politique, des quotas, des sanctions et du véritablement incitatif ?


Là, vous l'aurez compris, on est retournés à la face action militante individuelle qui constitue l'ouvrage et, en-dehors de se le procurer pour avoir une sorte de fil à plomb permanent dans votre poche, vous pouvez à ce titre soutenir Le passager clandestin. Pourquoi ? D'abord parce que vous n'êtes pas sans savoir que la hache de guerre du rationnel et de la décence a définitivement été déterrée l'année dernière par un gouvernement qui s'est payé le luxe volé de déterminer quel bien était essentiel et lequel ne l'était pas, entraînant la fermeture des librairies à la fois lieux de commerce, de lien social et de culture. En même temps, il n'y a pas de fumée sans feu et pas lieu de s'étonner quand on sait à qui on a affaire, mais toujours est-il que ces gens-là sont pour l'instant au pouvoir et que, la gauche et les écolos semblant adorer de s'auto-paralyser et ne comprenant pas l'enjeu d'un front résolument moderniste, eux ou d'autres équivalents risquent d'y rester. Donc clairement déjà on ne savait pas très bien où on allait mais avec la sur-crise pandémique actuelle (c'est quand même con, non, ça tombe vraiment mal, non?), on sait encore moins et donc autant se serrer les coudes, essayer de rattraper les effets désastreux sur le milieu de l'édition de ces fermetures indues (et le click and collect n'est certainement pas une solution pour les raisons mentionnées plus haut relatives à ce que représente de sacré une librairie physique). Par ailleurs, soutenir cette maison d'édition en devenant abonné.e pour recevoir ses futures parutions s'apparente à un panier de fruits et de légumes comme dans une Amap, système qui nous est cher à LocoBio, qu'il soit avec ou sans formalisation juridique estampillée comme telle d'ailleurs. Car suivant ce principe il s'agit bien de sécuriser un revenu pour le producteur, en l'occurrence ils sont certes plusieurs à la différence de l'alimentaire puisque l'éditeur est un intermédiaire entre le producteur (auteur du livre) et le consommateur (son lecteur). Une différence est aussi, et cela est plutôt bien, incite à les soutenir, que les livres sont déjà connus d'avance alors qu'un paysan rêverait d'avoir quelques certitudes sur sa récolte future. Vous pouvez vous en faire une idée, ainsi qu'un avis plus global sur le sujet et, j'espère, souscrire, sur : https://fr.ulule.com/passager-clandestin-abonnements2022. Alors, serez-vous plutôt petite ou grande traversée, ou alors grand seigneur mécène adepte de la croisière s'amuse ? En tout cas, rendez-vous en février pour la première livraison et surtout qu'un bon vent porte encore longtemps tous les petits passagers clandestins qui illuminent les cales de leur espoir résolument sans fin.

 

©Yolaine de LocoBio,

Décembre 2021

 
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