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Chronique 134
29-11-2021

 


Comment consommer responsable

dans un monde qui pousse

à la consommation irresponsable ?


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Vous l'aurez compris, cette chronique prend la balle au rebond du désormais institué « Black Friday » la semaine dernière pour faire un point sur l'avancée de la consommation responsable, je dirais malgré tout. Tout d'abord, qu'est-ce que ce type de consommation et à quoi s'oppose-t-elle ? A la consommation classique, c'est-à-dire faisant fi à la fois de l'épuisement des ressources de l' « environnement » mais aussi des aspects d'équité socio-économique (conditions de travail, bien-être animal...). C'est l'un des piliers de l'économie circulaire ainsi définie par l'ADEME (agence française de la Transition, créée au début des années 1990) : « système économique d’échange et de production qui, à tous les stades du cycle de vie des produits (biens et services), vise à augmenter l’efficacité de l’utilisation des ressources et à diminuer l’impact sur l’environnement tout en développant le bien être des individus ». Elle concerne un levier important d'action, à savoir la demande et le comportement des consommateurs, qu'ils soient individuels ou collectifs, privés ou publics. Toujours selon l'ADEME, pour consommer davantage responsable, il convient de se poser 3 questions et d'agir en fonction des réponses qu'on aura apporté, et bien sûr de l'offre existante dont on doit veiller à augmenter aussi la nature écoresponsable : quels sont mes besoins et si j'ai de réels besoins, alors j'oriente mes achats en m'appuyant sur les étiquettes et les labels de certification ; lors de l'utilisation de tel ou tel produit, je veille à limiter gaspillage et pollution de même qu'à faire durer le plus longtemps possible ce produit ; enfin, au moment de jeter, je me pose plutôt la question en termes de réemploi, de tri et de recyclage.

Où en est donc la consommation responsable dans notre pays ? Elle augmente, doucement mais elle augmente, plus ou moins sous la contrainte mais elle augmente, diversement selon les acteurs, mais elle augmente. La sensibilisation joue certes un rôle mais il faut noter aussi, comme souvent, le rôle notable des obligations légales, parmi lesquelles celles issues des lois Grenelle en matière de RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) ou encore le code des marchés publics qui, doublé d'une impulsion locale via les agendas 21, peut grandement booster les achats durables dans le secteur public, à commencer dans la restauration collective. A son échelle, le consommateur-citoyen est souvent sollicité, et parfois cela l'exaspère peut-être à juste titre, pour « faire sa part » moyennant quelques, de plus en plus de « petits gestes » comme ne plus acheter de produits jetables, respecter les doses préconisées, donner ce dont il ne se sert plus, etc... Dans le domaine alimentaire, parce qu'il retient particulièrement l'attention de LocoBio, différentes actions sont préconisées. Cela va de la réflexion sur les besoins, là encore, au compostage pour les déchets de cuisine en passant par l'achat de produits le moins/mieux emballés possible, locaux et de saison, ou encore à l'inventaire régulier du réfrigérateur pour éviter de gaspiller.


L'évolution de la consommation responsable est régulièrement monitorée et on peut citer à ce titre comme référence le baromètre annuel de l'Ademe dont je vous mets le lien pour cette année : https://presse.ademe.fr/2021/05/14eme-barometre-de-la-consommation-responsable-2021.html. Cette étude est très encourageante car elle montre que, malgré la crise sans fin connue à ce jour, que nous traversons du fait de la pandémie (et je rajouterais malgré un virage sécurito-identitaire de plus en plus marqué pouvant détourner l'attention, décourager sans vergogne et de manière coupable), l'attrait pour ce type de consommation alternative reste constant. Je cite : « (…) cette année particulière n’aura pas déstabilisé l’engagement des Français, qui font de l’urgence environnementale une de leurs priorités : en 2021, 72% d’entre eux sont mobilisés en faveur de la consommation responsable. Preuve une nouvelle fois de l’importance des enjeux environnementaux dans la vie des consommateurs, et ce, en dépit d’un contexte sanitaire, économique et social complexe ». Mieux : il existe chez les consommateurs interrogés une véritable attente vis-à-vis des entreprises avec l'idée que ce serait une peu comme la fin d'une époque eldoradesque, qu'il faudrait en finir avec une déconnade au fond pas si douce, autant dire que la pub qu'elles émettent soit un peu plus fiable, permettent de faire des choix plus en conscience et meilleurs pour tous. Sur ce point, et malgré des avancées timides, je demeure personnellement très sceptique car il faudra qu'on m'explique comment pub et fairplay pourront cohabiter un jour. Le marketing reste le marketing mais ceci est après tout un sujet certes important mais connexe, donc autant ne pas se laisser démoraliser et agir sur là où on peut agir. A ce propos, la même Ademe procède régulièrement à des études sectorielles qui nous servent d'information quand on s'intéresse à ces sujets mais qui lui servent aussi bien évidemment à elle pour contribuer fortement à la politique en faveur de la consommation responsable dans notre pays. D'ailleurs, j'en profite au passage pour renvoyer à leur site où vous trouverez toute une panoplie de formations et d'aides, que ce soit pour vous former sur des aspects généraux de la Transition comme « simple » citoyen ou sur des points plus précis en tant que professionnel de tel ou tel secteur (https://www.ademe.fr). Viennent donc de paraître les conclusions d'une enquête menée en partenariat avec une entreprise du secteur du développement durable, Greenflex. Et pour revenir à mon sujet initial du Black Friday, il apparaît clairement que toutes ces périodes de promotion, donc d'incitation à la consommation tout court et à la consommation non-responsable en particulier, ébranlent le patient travail d'éducation et de pratique de la sobriété. CQFD. Bien que conscients des techniques de véritable manipulation utilisées à leur encontre (des prix soit disant attractifs dont il a été montré qu'ils avaient en fait souvent été gonflés avant la période où il n'était plus possible d'en bouger le montant), les Français ne peuvent s'empêcher d'attendre ces périodes. Alors la faute à quoi, on peut se demander. J'avance la triple hypothèse du « c'est normal » car il paraît que le pouvoir d'achat aurait augmenté mais je ne suis pas certaine que les gens en bénéficient concrètement, c'est-à-dire dans leur porte-monnaie et leur panier. Ensuite, on ne peut pas demander aux plus modestes, de plus en plus nombreux avec l'affaissement et peut-être bientôt la disparition de la classe populaire, de moins consommer alors que consommer demeure un signe de réussite sociale. Enfin, surtout en cette période anxiogène au possible, à l'anxiété visiblement volontairement entretenue pour tenir les corps et les esprits, consommer reste une valeur refuge, un peu comme s'auto-cocooner. Toujours est-il qu'autre signe encourageant, si les consommateurs ont le choix, ils déclarent très massivement (près de 80%) privilégier l'achat d'un produit responsable. Sauf que... mais... mais... mais ils se plaignent que ce choix n'existe pas assez souvent. Concernant le secteur essentiel des biens d'équipement, des progrès sont aussi notables car il existe une véritable attente envers la technologie : elle doit moins conduire à consommer qu'à permettre aux objets de durer plus longtemps afin de limiter des impacts socio-environnementaux dont la conscience augmente elle aussi. En matière de cosmétique, produits d'hygiène et d'entretien, on semble un peu revenir à des dimensions raisonnables car avoir le choix parmi une quantité invraisemblable de marques, donc beaucoup toujours nouvelles, semble moins une priorité qu'être assuré de la qualité pour sa propre santé de ce qui est acheté.



La santé, la préoccupation croissante pour qu'elle demeure bonne, sont on le sait une tendance forte de notre époque. Cela peut expliquer les résultats de l'étude concernant l'alimentation qui « reste la locomotive de la consommation responsable » ( p.5, voir https://presse.ademe.fr/2021/11/barometre-de-la-consommation-responsable-2021.html). Comment ? Par différentes actions, comme évoqué plus haut, à savoir :

  • une évolution du régime alimentaire pour des raisons environnementales et/ou de bien-être animal. Près d'un quart des Français ont ainsi connu une telle évolution et s'affichent de plus en plus comme des omnivores, certes, mais flexitariens tendant à limiter le plus possible leur consommation de poisson et de viande.

  • La lutte contre le gaspillage alimentaire à la fois à la maison et hors de celle-ci. Cela passe par quasi ¾ des personnes interrogées qui disent consommer des produits même quand leur date limite est dépassée et suggère donc que l'information concernant la moindre prise de risque de consommer tel ou tel produit fait son effet dans le grand public.

  • Le fait de demander aux restaurateurs de pouvoir emporter les restes de leur assiette est en hausse mais il est limité par une forme de honte qui serait sans nul doute mise hors-sujet si les restaurateurs en question le proposaient systématiquement. Or il y a une forte attente concernant ce changement de comportement, de même que face à une offre voulue plus large de produits bio et locaux lorsqu'il s'agit de restauration collective.



Vous le constatez, malgré les discours se faisant passer pour des analyses très très sérieuses sur le moral des Français « en berne », sur « la France  qui va mal », eh bien les choses avancent, mûrissent doucement et faire un effort pour maîtriser les tenants et les aboutissants en matière de consommation responsable en atteste. Pour ceux que des approfondissements intéresseraient, je renvoie aux travaux d'une des chercheuses françaises spécialistes du sujet, Sophie Dubuisson-Quellier (https://www.sciencespo.fr/cso/en/chercheur/Sophie%20Dubuisson-Quellier/844.html) et aux guides pratiques suivants afin... de cultiver ses fameux « petits gestes » : https://www.inc-conso.fr/content/consommation-responsable-33-reflexes-adopter-au-quotidien et https://www.economie.gouv.fr/particuliers/gestes-consommer-responsable.

 

©Yolaine de LocoBio,

Novembre 2021

 
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