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Cogitations et actions
Chronique 108
15-04-2021

 

Froid dans le dos, ou pourquoi l'agriculture urbaine

est le vrai nerf de la guerre...

 

  

ou plutôt le nerf de la vraie guerre, c'est-à-dire pas celle décrétée depuis le début de la pandémie par nos chères autorités. Je sais, ça commence mal, doublement mal, cette chronique : d'abord c'est quoi ce titre à rallonge qui déborde sur le début du texte? Et puis c'est quoi ces idées noires, limite un peu énervées ? Ben c'est que... c'est que ma bonne dame, comme on disait à l'ancienne, c'est que comment vous dire, justement : ben les choses, c'est juste que faut les dire. Oui, quand faut les dire faut les dire et faut veiller à une analyse lucide de la situation et les mots raccords, avec, en face. Autant dire du gros lourd de méchant combat, et je pèse mes mots croyez-moi ! Bon donc une fois qu'on a dit ça, c'est quoi le sujet du jour ? Sans surprise, le dada principal de LocoBio : l'a-gri-cul-tu-re ur-bai-ne. A priori, on voit pas très bien le rapport avec la guerre mais en fait si, mais si mais si.

 Et là, le pire, c'est plus la guerre comme métaphore, gentil gros mot d'un combat fleur bleue-gentil écolo, non là, la guerre c'est la vraie guerre, le truc vraiment comme dans le titre là-haut qui fait froid dans le dos. Y'en a qui vont se dire oula elle a viré en mode effondrement, ça commence à puer le survivalisme et pourquoi pas d'autres extrêmes ? C'est vrai quoi, c'est quoi ces manières d'employer les mots, là, grands, tout de suite ? Ça serait pas un peu dramatiser, ça serait pas un peu beaucoup se radicaliser (de « radix, radicis », la racine en latin, calma, calma) ? Oula oula, on marche sur des oeufs plus trop frais, carrément pourris mais non, en fait faut y aller et pas avoir peur de regarder et surtout de la dire la réalité. Tout simplement parce que sinon elle va continuer à être confisquée par ceux qui sont au pouvoir grâce au suffrage citoyen, à l'impôt citoyen aussi au passage, ceux qui prennent depuis des années des décisions totalement à l'envers du réel et qui, surtout, se pensent intouchables sans doute par les réserves qu'ils font de leur propre côté. C'est faux ? C'est parano ? Pas si sûr, pas si vite : un de mes amis haut placé, pas vraiment de droite et encore moins d'extrême droite, volontiers bien pensant et donneur de leçons, me disait il y a quelques années qu'en cas de problème... il partirait avec sa famille à l'étranger ! J'avoue avoir alors marqué une certaine surprise. Le pire c'est que lui non donc tout semblait très clair et motivé par un bon matelas mis de côté. Bon, c'est sûr, quand on est tous claquemurés à cause d'une petite bébête qui se fout des frontières étatiques, c'est sûr que cette attitude peut faire sourire de naïveté. Sauf que non car elle est symptomatique d'une mentalité qui en-dehors d'être immorale a de quoi inquiéter le reste de la population dans un régime pour l'instant encore démocratique.


Bon, et l'agriculture urbaine dans tout ça ? Non mais parce que la politique c'est bien joli, mais le jardin, les poules, les biz-biz abeilles dans tout ça, on pourrait pas un peu se détendre et revenir au sujet ? Si, volontiers. C'est juste que l'agriculture urbaine est par essence politique et que c'est LE sujet, donc normal de parler politique en prolégomènes de l'avant-propos du propos principal proprement dit qui s'en vient, là, tout de suite. Et donc à propos de ce sujet socio-politique, je ne saurais que trop vous recommander de visionner sur le Net l'interview de Stéphane Linou, auteur de Résilience alimentaire et sécurité nationale (TheBookEdition, 2019), livre qui s'est inspiré de son expérience pionnière de locavorisme voici plus d'une décennie dans le sud-ouest de la France et qui a à son tour inspiré une proposition de loi déposée par une sénatrice en décembre 2019 (et d'ailleurs rejetée). Il rappelle à juste titre qu'historiquement l'Humanité s'est développée en cessant de courir en toutes saisons après la nourriture et que la fonction nourricière a longtemps été associée à celle des villes et de leurs dirigeants. En clair, il y avait de quoi manger à portée de main, les élites y veillaient et tiraient leur légitimité de cette assurance peut-être pas tous risques puisqu'il y a bien eu des famines mais la question se pose de qu'est-ce qui se passerait aujourd'hui en cas de rupture de la chaine alimentaire avec des territoires qui nous entourent bouffés par l'inflation du foncier, cultivés mais parfois pour exporter, en plus cultivés on sait pas trop dans quelles conditions pour la santé et... et... sans plus personne pour les cultiver faute de paysans et de savoir-faire envolés. Du coup, très clairement, de glissement en glissement, entre inconscience et intérêts de certains (acteurs économiques et politiques) bien placés, qu'est-ce qui est arrivé ? Ben tout simplement ce qui devait arriver : la question de l'alimentation stricto sensu, c'est-à-dire même pas de la qualité de ce que l'on mange mais de sa disponibilité, de l'approvisionnement minimal correspondant à nos besoins vitauxen tant qu'êtres basiquement vivants à la surface de cette pauvre planète, cette question-là est sortie du champ politique. Grâce à son expérience, à son livre et à son dynamisme, des personnes comme S.Linon contribuent à faire ce qu'il faut depuis longtemps et avec une urgence que bien sûr le virus a rappelée : repolitiser la question de l'alimentation, l'imposer sur l'agenda politique plus que de « nos » politiques. Et cela en répondant aux 3 questions que pose l'auteur : est-ce risqué de ne pas produire là où on consomme ? Y a-t-il des plans, des stocks et la population est-elle préparée en cas de problème d'approvisionnement ? Est-ce qu'acheter ce qui est produit loin n'est pas produire de l'insécurité au niveau local ? Car actuellement la vérité est que le pétrole, l'artificialité des prix en matière de transports plus globalement, et le développement massif d'une gestion numérique du tout n'a fait qu'augmenter notre vulnérabilité. Et Linou de demander si c'est bien sage, et Linou de travailler le sujet carrément avec les forces de l'ordre et même l'armée. Et Linou de, lui, nous donner froid dans le dos car clair de clair, à force d'avoir dépolitisé la question, elle est comme une dent, dévitalisée, et même les premiers concernés rompent le silence et avouent un total impensé.


En bref, vaut mieux qu'il arrive rien parce qu'on n'est pas tous pleins aux as, héritiers ou bobos ayant parcouru le monde, bien fait du gras dans le tertiaire-financier-haute voltige à s'être dit que finalement la campagne on y respire mieux, à Paris ça schlingue et alors faut s'acheter dare-dare de la terre pour justement y atterrir. Ouais, vaut mieux qu'il arrive rien car l'écrasante majorité écrasée n'a, elle, pas de terre et de toutes façons qui sait la cultiver ? Même les bobos tsouin-tsouin, il leur faudra du temps pour arriver à faire pousser une salade, pas folles elles les limaces, donc clair de clair on n'est pas arrivés. Et donc ? Et donc c'est la cata, bien sûr que c'est la cata. Mais ça c'est pas un scoop, ça fait longtemps que c'est la cata. C'est juste que là faut se magner le c... et changer juste un truc minus, non c'est pas grand chose, c'est juste revenir à l'endroit de nos besoins fondamentaux et changer de paradigme comme les roues de nos bagnoles à benzine. Et du coup, là, l'agriculture urbaine, le lien, c'est quoi ? Attention magie : le lien est dans la résilience des territoires. Joli, non ? Qu'est-ce que c'est que donc ça la résilience ? Et non, pas du développement personnel-t'en veux appliqué aux petites fleurs, encore que. C'est, attention les enfants, la capacité d'un territoire à dépasser des chocs ! Chocs, chocs, mais quels chocs ? Ben comme dit plus haut, au cas où peut-être pas trop loin de plus rien à bouffer, comme ça, clac, du jour au lendemain. Et du coup si on reverdit un peu tout ça, chacun à son poste et à son échelle parce que c'est clair aussi que tout le monde a peut-être pas envie ou pas la possibilité de devenir agriculteur urbain, par capillarité et progressivement, on devrait y arriver. Sans compter qu'évidemment cultiver ce n'est pas « que » cultiver au sens de produire de la nourriture. Beaucoup se joue autour de cette activité dont on s'est et on a été coupés à tort : bien sûr du lien social, bien sûr de la curiosité pour d'autres êtres vivants que nous plutôt que de les faire disparaître avant même de tout à fait les connaître, bien sûr de la culture tout court. Et maintenant que les livres sont à nouveau reconnus par nos chères autorités comme essentiel (il aura fallu un an de crise sanitaire, un 3ème confinement et combien de drames silencieux et impunis entre temps?), alors on peut souffler et se dire que cet argument de la culture a peut-être voix au chapitre. Mais je comprends pas : quoi, de la culture au jardin ? C'est quoi encore le rapport ? Le rapport c'est tout simplement que des évènements culturels ont déjà lieu depuis belle lurette dans les lieux de culture au sens strict, type concerts, trocs de graines et de livres, causeries et que le jardin au sens large est un lieu de culture par excellence puisque c'est le cœur d'une civilisation vraiment vivante. A partir de là, on en tire les conclusions qu'on veut. Moi, on l'aura remarqué, je suis une convaincue, ou plutôt non, comme disait mon vieux prof de science politique, dans convaincu y'a « con » et « vaincu » alors moi je suis peut-être con mais au moins j'assume et clair de clair je suis pas vaincue et même qu'on est un nombre de plus en plus certain à être dans mon cas. Alors ? Alors ben va falloir que les choses bougent gentiment parce que la chute du Stéphane Linou en question n'est en revanche pas jojo à ce propos. Il dit juste, et à raison, on a déjà eu quelques échantillons (never forget the Gilet jaunes), que si on veut pas de panique et pas de troubles à l'ordre public, pas de forces de sécurité dépassées et pas de pouvoir démocratique lui aussi vite dépassé, donc en clair si on ne veut pas que tout ça se finisse mal entre répression, chaos, dictature pas vraiment vert-écolo et famine, ben va falloir que ça bouge vite dans les hautes sphères des hauts sommets.


Au final, on pourrait se dire : mais pourquoi autant placer le débat au niveau politique et pourquoi tant d'agacement ? On pourrait pas plutôt se concentrer, là, tranquillement, sur des aspects techniques, je sais pas moi, avancer en mode disgnostic-projet, identifier les freins et les solutions  pour la développer, là, gentiment, cette fameuse agriculture urbaine? Ben si. L'un n'empêche pas l'autre et j'ai déjà évoqué des poins dans cette perspective ici et j'y reviendrai bientôt aussi. C'est juste qu'il faut voir les choses en face et que rien ne se fera sans prise de conscience et éthique de la responsabilité. A tous les niveaux, chacun faisant sa part comme dans toute société démocratique consciente que si tout s'est fait tout peut se défaire aussi, la démocratie n'a absolument rien d'un donné ou d'un acquis. Et oui, on en est là. Dont acte : tous à vos bombes fleuries, action !



©Yolaine de LocoBio,

Avril 2021


 
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