Et maintenant ?
Quelques leçons à tirer
après la démission de Nicolat Hulot
On peut ou non apprécier l’homme, mais la question est
mineure à côté des enjeux réels. Et d’ailleurs, c’est ce que n’a cessé de
répéter le principal intéressé lorsqu’il a, voici à peine une semaine, annoncé
en direct sur France Inter sa démission en tant que Ministre d’Etat chargé de
la Transition écologique et solidaire.
Compte-tenu de la situation, dont l’été caniculaire n’aura
été que la partie visible, nul n’est donc besoin de s’appesantir sur les
questions de personnes. Ce qui importe davantage, c’est de relever les
(nombreux) points de blocage mis en lumière afin de les neutraliser rapidement.
Dire que c’est une mince affaire, non, pas vraiment. Mais nous n’avons pas le
choix. Dont acte, ou plutôt liste :
1) Le
manque de vision et l’absence de cohérence de l’action gouvernementale, d’où un
isolement au sein d’une prétendue équipe et la non-priorisation de
l’ « écologie ». Les causes ? Des lobbies qui raisonnent
sectoriel, ne font jamais que leur job, c’est-à-dire défendre des intérêts
sectoriels. Et surtout des hommes à la tête de l’Etat qui sont sous leur
influence en plus d’être incultes au sens où ils n’ont rien compris au
changement de paradigme qui s’impose. D’où des questions de fond relatives au
fonctionnement de notre démocratie et à la formation des élites.
2) La
responsabilité est bien collégiale. Nicolas Hulot s’interroge à mon sens à
juste titre sur notre capacité à mener de grands combats quand des gestes comme
jeter son mégot par terre ont encore cours. Certes, s’il a renoncé à sa charge,
c’est parce que la politique des petits pas n’est pas à la hauteur des enjeux
et de l’urgence. Mais la vérité est aussi qu’il n’y a pas de petit geste et qu’il
en va d’un minimum de conscience citoyenne. Eduction et civisme, plus que
jamais.
3) La
responsabilité étant collégiale face à un défi universel inédit, il faudrait
une société plus structurée et mobilisée, de même qu’un parti vert plus fort
sur l’échiquier politique. Nicolas Hulot évoque même la nécessité d’une
« union nationale » permettant de fédérer les grands acteurs de la
société afin de transcender les conflits. Certes. Moi je pense surtout que les
écolos n’offrent pas de vision claire d’un modèle alternatif global, se perdent
en querelles d’égos et n’arrivent pas à dégager un-e leader armé-e pour tenir
en politique. Car de la carrure et du charisme, il en faut pour mener un
véritable combat dans cette arène incontournable.
4) La
responsabilité étant collégiale… j’appelle l’Europe ! Pas celle des
marchands qui dominent aussi à cette échelle et imposent une vision réduite de
l’économie. Il est grand temps que l’austérité ne serve plus seulement à
étouffer les peuples mais bien à étouffer les spéculateurs qui, sans limite
aucune, font leur beurre sur les biens communs. Il est aussi grand temps que
l’économie cesse d’être opposée (comme le social) à l’écologie et que l’on ne
raisonne plus qu’en termes de dépenses mais bien d’investissements. Car Nicolas
Hulot a raison de rappeler l’avantage que nous avons à être dotés des outils
technologiques nécessaires à la Transition. Il faut poursuivre dans cette voie
et, selon ses propres dires, « choisir dans l’économie ce qui participe à
la solution ». Par exemple, choisir un modèle agricole intensif en emplois
et non en pesticides, élaborer un plan de souveraineté alimentaire en protéines
végétales ou encore cesser d’éponger les externalités négatives pour l’économie
aussi de l’agriculture actuelle (dépenses de santé liées aux maladies).
En bref, Nicolas Hulot souhaite faire de son geste un acte de
mobilisation et non de résignation. Que dire ? Il se sent peut-être seul
mais on est là, vent debout, à tenir le cap. C’est pourtant pas compliqué :
une fois qu’on aura posé comme valeur suprême le vivant, toute l’architecture
du changement se dessinera et s’imposera. Si on veut bien et si on ne laisse
pas interférer les toxiques. Courage, courage…
©Yolaine de LocoBio
3 septembre 2018
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