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Chronique 51
29-06-2012
Fin de campagne, début de partie

 

Ouf ! Enfin ! Terminée l'interminable période de latence avant the présidentielle et the législatives dans la foulée. Nous y sommes. Nous sommes maintenant fixés, dotés d'un « président normal ». Je ne vais pas épiloguer sur une expression qui lasse déjà et artificiellement occuper le terrain avec des débats aussi pauvres que les relations entre journalistes sportifs et footballeurs de l'équipe (penaude) de France.

« Normal », c'est juste remettre le curseur dans la zone du raisonnable dans tous les domaines, après les cinq années délirantes du mandat précédent. Mais être « normal » ne constituera jamais un programme politique en soi. Certes, il fallait l'être et l'afficher, cela n'était pas trop difficile, pour gagner contre Nicolas Sarkozy. C'était une rupture de style comme 2007 en avait été une aussi. Mais ça s'arrête là. Une fois l'équipe précédente balayée et la nouvelle en place, quelque part toutes ces folles années à vide ne doivent plus exister. Si le « normal » n'est plus dans l'opposition, s'il est au pouvoir, alors il doit rompre avec beaucoup plus que le sarkozysme. C'est sans doute le plus difficile : sortir des schémas simplistes de la politique électoraliste -ponctuellement nécessaire, c'est aussi le jeu-, accéder à la maturité, s'écarter des représentations manichéennes qui toujours vous sauvent pour peu de se croire être du bon côté, se poser et agir. Le grand défi du président actuel et de ses soutiens désormais casés sera bien la lucidité, la créativité et le courage. Hors de ce défi, l'Histoire ricanera de la « normalité ».


Elle ricanera d'autant plus que la suite risque d'être tout sauf normale si les devants ne sont pas pris très rapidement. A moins que rejouer la crise des années 30 ne devienne la norme. Mais alors... mais alors il y a franchement de quoi s'inquiéter et surtout fuir la norme. Pourtant cette norme-là rôde ; il suffit de peu pour qu'elle soit déjà là. Nous marchons, inconscients, sur les braises d'une société bien avancée sur la voie de la désintégration. Une partie de la population d'origine immigrée se tourne vers le communautarisme religieux qui sait lui apporter aide matérielle et réconfort moral. Ce n'est pas rien : c'est souvent l'identité et la fierté que la France n'a pas su donner en ne reconnaissant pas ses errances coloniales, post-coloniales aussi d'ailleurs. C'est cette identité et cette fierté que le temps malsain, gelé, du passé, transformé en haine, confisque. La haine occupe facilement l'espace d'une intégration socio-économique non consommée. Pour les immigrés plus que pour les autres, la panne de l'ascenseur social a été fatale, les 40 « Piteuses » -puisque nous en sommes à 40- ont brulé cette terre prometteuse. Car il n'y avait pas de raison, pas d'histoires ni d'élucubrations : nous sommes, nous avons toujours été un pays d'immigration, nous sommes pays parce que d'immigration. Alors celle-ci, juste celle-ci à ce moment-là bloquerait ? Allons, il doit bien y avoir des raisons. Parmi celles-ci, il y a les ravages du déni concernant notre passé et ceux, non moindres, du déni concernant le présent. Je l'ai dit plus haut : le grand défi actuel, c'est la lucidité.


Je prétends même que les Bisounours -fréquente insulte adressée aux « écolos » et autres utopistes-, ce n'est pas moi, ce n'est pas vous qui pensez comme moi ; ce sont eux. Eux, c'est-à-dire ceux qui sont dans le déni massif. Car l'inconscience quant à l'état de délabrement de notre société concerne aussi un autre communautarisme bien portant : le nationalisme. Lui, il ratisse dans les couches de la population « de souche » auparavant bien intégrée ou ayant l'espoir raisonnable de l'être. Il ratisse easy, de plus en plus large. Ça pue, mais il y va sans se pincer le nez, lui, avec des discours tout faits. Oui, on s'inquiète. Mais non, c'est pas si grave. Quand même, ça pue. Non, ça ne pue pas, ce n'est pas bien de dire cela : il faut y aller. Tergiversations coupables des non-touchés directement, je veux dire dans leur chair et dans leur porte-monnaie. Combien de modérés vireraient aux extrêmes s'ils viraient déclassés ? Ne jamais oublier que perdre jusqu'à sa fierté est intolérable pour nous autres, pauvres humains. Alors aux sans rien, aux de moins en moins, c'est certain, le communautarisme dispense de l'identité à fortes doses.


La société est donc profondément clivée entre communautaristes et républicains, le premier groupe étant lui-même comme on l'a vu, clivé. Clivé mais avec d'importantes et inquiétantes affinités. Les Républicains ont de quoi se faire du souci. Evidemment que la République est en péril. Evidemment que la citoyenneté, si moribonde sur sa face économique et sociale, est la clef.


Mais savoir ne suffit pas. Il faut oser. Oser imaginer et agir autrement. Et cela vaut pour tous, à commencer par ceux -Europe Ecologie-Les Verts- qui incarnent le plus les alternatives. Désormais dotés d'un groupe dans une Assemblée Nationale ultra-rose grâce à d'habiles alliances prouvant leur maturité politique (bienvenu au jeu...), il leur revient à eux peut-être plus qu'aux autres d'insuffler le changement. Je veux dire le vrai changement. Pas celui d'un slogan déjà suranné, la titulaire du Ministère de l'Ecologie sous le fugace gouvernement Ayrault I mais plus sous Ayrault II, pouvant sans doute en témoigner. Le vrai changement, le premier des changements, passe par un désétiquetage de l'écologie. Je m'explique. Structurer un parti, y appartenir et se rassembler sous une étiquette est nécessaire en politique. D'où l'écologie politique et ses développements historiques. Mais à un moment donné, cette étiquette enferme et cela devient contre-productif (j'aime pourtant cela!), contre-productif pour la cause elle-même (et j'aime moins cela!). Car le cœur de l'écologie, ce ne sont pas les « p'tites fleurs », autre insulte fréquemment reçue. (Au demeurant, c'est une jolie insulte, sans doute la plus jolie de toutes celles adressées aux partis politiques). Le cœur de l'écologie, c'est l'humanisme, enfin un humanisme décentré de l'humain égocentré. Le cœur de l'écologie, c'est le vivant, point. A partir de là, je ne peux pas comprendre les écologistes majoritaires, ceux qui sont aux manettes avec les autres « grands » de la politique. Il faudrait être plus ferme sur ses positions. Et rien ne dit que cela ne « paierait » pas politiquement.


François Hollande a choisi, lui, « le juste » comme fil à plomb. On verra bien s'il parvient à le décliner et à l'appliquer. Ce « juste » n'est d'ailleurs pas si éloigné du vivant. Sauf que j'en doute. Je crains la pression et le conformisme ; je crains la pression du conformisme. Je crains la gestion, celle d'une nouvelle équipe de vrais Bisounours qui croiraient en l'économie actuelle, le retour de la croissance, de l'emploi et le toutim. Franchement, le « redressement productif » et vous avez vu qui à sa tête... J'ai dit « humanisme décentré de l'humain décentré »... Déjà les chiffres sont mauvais et je gage qu'ils le resteront jusqu'à écroulement tout à fait.


Avoir le vivant comme ligne, c'est :

  • S'étonner de tant de décrocheurs, de plus en plus de décrocheurs de fait et toujours pas de décision de décrocher d'une économie parasite.

  • Rompre véritablement en régularisant tous les sans-statut, tous ces bénévoles, qui donnent de leur temps curieusement sans argent en retour. Bien sûr, ils hésitent à donner plus par manque de reconnaissance, par épuisement et par besoin d'un minimum d'argent. Car eux aussi, ils en ont besoin. Vous croyez quoi ? Et s'ils parlent d'argent, ils montrent leur « vrai visage », ils sont intéressés ? Quoi ? Eux, ils sont intérssés ? J'aimerais rire.

  • Etendre la logique solidaire, évoluer vers une économie pour partie marchande (car il le faut au moins encore un temps) et pour partie non marchande (car il le faut tout autant). La proximité, le lien social, ne sont pas que des mots. Chacun et tous, nous sommes affamés de proximité et de lien social.

     

A partir du moment où l'humain, cette part du vivant, sera respectée, sera en mesure d'être respectée, de se respecter elle-même, alors l'écologie, la verte, la « défense de l'environnement » en découlera. Il n'y aura plus d' « environnement » puisque le vivant aura été remis au centre, à sa juste place. Nous serons sortis d'une économie parasite qui externalise tout pour à tout prix se maintenir, morte-fausse vivante : emplois, quête des terres riches, déchets, guerres.


On l'aura compris : point de salut sans décrochage idéologique. Que voulez-vous, j'en conviens, c'est ingrat, ambiance écuries d'Augias. C'est fait exprès ou quoi ? Il revient aux époques rasibus de prendre de la hauteur de vue et de faire que ça soit le moment juste... juste quand c'est pas le moment ? Oh non ! Mais si. Cela s'appelle la lucidité, la créativité et le courage. Zut alors, c'est trop dur ! Mais non : courage.




@Yolaine de LocoBio

28 juin 2012

 

 
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